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.: Orphée et Eurydice :.

Vous avez à votre disposition :

Le projet a été mis en oeuvre dans une classe de cycle 3 en ZEP. Il s’est déroulé sur 3 semaines, à raison d’une séance quotidienne d’environ 1h15, en moyenne (dans le cadre de différentes disciplines : Littérature, Arts visuels, Education musicale, Observation réfléchie de la langue, Maîtrise de la langue orale). Un plan général du déroulement est proposé ci-dessous.

Autour du mythe d’Orphée et Eurydice

Première étape : Entrée dans le mythe

Séance 1 : Présentation d’une œuvre picturale
Séance 2-3 : Production d’écrit autour de l’œuvre picturale (production d’hypothèses)
Séance 4 : Lecture du mythe par le maître avec anticipation

Deuxième étape : Analyse fine du texte

Séances 5-6 : Repérage de la trame narrative et des personnages "actants"
Séances 7 : Caractériser un personnage
Séance 8 : Imaginer… Représenter…
Séance 9 : Elaboration individuelle d’un résumé

Troisième étape : Hypertextualité à travers un extrait d’opéra

Séance 10 : Ecoute musicale
Séance 11 : Etude du texte

Quatrième étape : Elaboration d’une trace écrite finale

Séances 12-13 : Constitution d’une affiche (résumé collectif, illustrations, etc.)

Autour d’autres récits mythologiques

Première étape : Lecture des textes (en groupes)

Séance 1 : Lecture d'un mythe, discussion en groupe, résumé oral
Séance 2 : Compréhension fine (questionnement)

Deuxième étape : Mise en commun

Séances 3-4 : Icare / Thésée et le Minotaure
-> Présentation et questionnement / Arts visuels
Séances 5-6 : Narcisse / Echo et Narcisse
-> Présentation et questionnement / Arts visuels

Evaluation finale : Lien entre arts visuels et mythes

Vue générale de la mise en œuvre du projet

Autour du mythe d’Orphée et Eurydice

La première période du projet, d’une durée de deux semaines, s’articule autour du mythe d’Orphée et Eurydice.

Première étape : Entrée dans le mythe

Séance 1 : Présentation d’une œuvre picturale
Domaines : Arts visuels, Maîtrise de la langue

Nous avons pris le parti d’entrer dans le mythe d’Orphée et Eurydice par les arts. Les élèves doivent être capables de caractériser sommairement une œuvre d’art, de formuler des hypothèses sur ce qui est représenté et d’argumenter devant leurs pairs. Ils doivent également être capables d’exprimer leurs émotions et écouter celles des autres. Le tableau choisi (Orphée aux Enfers) a été réalisé en 1594 par Jan Bruegel, peintre flamand de la Renaissance (in BERTHERAT, M., 2000. Les mythes racontés par les peintres. Paris : Bayard Jeunesse). Ces informations, ainsi que le support, la technique utilisés et son emplacement actuel (Florence, Italie), sont donnés aux élèves. Seul le titre Orphée aux Enfers sera apporté plus tard (pour ne pas induire les hypothèses). L’analyse du tableau se déroule selon plusieurs modalités : l’approche figurative, l’approche émotionnelle et l’approche interprétative.


Orphée aux enfers - Jan Bruegel

Approche figurative (aspect descriptif)

a) Les personnages principaux

Identifier les personnages principaux (bien qu’ils n’occupent pas le centre du tableau), à savoir Hadès, le dieu des Enfers et Perséphone, son épouse ; Orphée ; Eurydice.

Les élèves ont rapidement identifié les personnages principaux, à savoir :

- Hadès, le dieu des Enfers et Perséphone, son épouse : une reine et un roi, parce qu’ils ont des couronnes.
- Orphée :
un homme qui fait de la musique, un chanteur, un musicien. L’hypothèse sur le nom de l’instrument de musique fût posée plus tard : une harpe.
- Eurydice : Elle a été identifiée plus tard que les trois autres personnages, et ce n’est qu’après qu’un élève en ait parlé (
on dirait qu’ils dansent) qu’un autre élève a vite perçu l’enjeu (c’est des prisonniers, quelqu’un tient celle du milieu).

Nous voyons ici toute la richesse des échanges entre les élèves : le cheminement de l'un nourrit celui de l'autre.

b) Les monstres et autres personnages des ténèbres

D’emblée, les élèves ont perçu l’importance des monstres (il y a pleins de monstres), perception qui a été déclinée à la lumière de leurs connaissances antérieures (on dirait des Gaulois), ou en référence avec leur vécu cinématographique (des extra-terrestres qui débarquent). Les élèves ont été invités à identifier plus précisément ces monstres. Ainsi, certains ont vu des lézards à ailes, une tête de cheval, un singe en lumière, avec un cœur de feu, un cœur de lampe, une tête de dragon, un paon ou encore un canard.
c) Les éléments du décor
Le recueil des verbalisations a été riche. Aussi ont-ils, par exemple, parler des maisons et de la fumée, de l’eau, d'une rivière, du feu qui brûle, du sang, des os, d'une grande roue, d'une lumière.

d) Les couleurs

Les couleurs perçues ont été le noir (ce qui domine le tableau), le vert, le jaune (halo de lumière) et le rouge. Le noir, omniprésent, a été aussi bien la raison pour laquelle certains élèves ont détesté le tableau que celle pour laquelle d’autres l’ont aimé. Le jeu de couleurs a également été apprécié par quelques élèves (j’aime bien parce que les couleurs ressortent).
Approche émotionnelle

Après ces différentes prises d’indices, il est demandé aux élèves de parler de leurs émotions à la vue de ce tableau.

Ainsi, pour certains, ce tableau fait des frissons. Une majorité d’élèves n’aiment pas ce tableau, qui est très sombre, esthétiquement et symboliquement (je n’aime pas parce qu’il y a plein de noir). Les quelques élèves qui aiment ce tableau disent avoir plaisir à s’y projeter avec l’idée que combattre des monstres doit être amusant (J’aimerai bien y être parce qu’il y a pleins de monstres, c’est l’aventure).

Compte tenu de l’importance d’Orphée dans la suite du travail, il est demandé aux élèves de caractériser Orphée.

A ce niveau, les avis sont partagés : certains pensent qu’il est triste (indice figuratif : bouche qui tombe), d’autres pensent qu’il est content (indice interprétatif : il est content parce qu’il joue de la musique). Un élève pense même qu’il est triste parce qu’il a du sang derrière (indice figuratif et interprétatif).
Approche interprétative : où se déroule la scène ?

Lorsqu’il a été demandé aux élèves de faire des hypothèses sur l’endroit où se déroule la scène représentée par le tableau, il a été impressionnant de voir combien les élèves ont perçu "sensitivement" ce qui était représenté, mais aussi les bénéfices qu’ils étaient capables de tirer des hypothèses formulées par chacun d’entre eux.

L’hypothèse d’une grotte a été largement posée (parce que c’est noir, parce qu’il y a pleins de trous), tandis que certains ont fait appel à leur vécu, en reconnaissant dans cette scène quelque chose qui ressemble à un parc d’attraction.

Il a été amusant de constater qu’à la question "où cela peut-il bien se passer ?", certains ont répondu en terme de temps et non d’espace : y’a longtemps, conscients que de tels "paysages" n’existent pas aujourd’hui.

D’autres, tentant sans doute de rationaliser leur réponse, ont recherché dans d’autres continents, inconnus d’eux, une réponse. Aussi ont-ils pensé que l’histoire se déroule en Asie, hypothèse aussitôt contredite : mais y’a pas de monstres en Asie !.

Certains vont plus loin encore en posant l’hypothèse que l’histoire se déroule dans une planète de l’espace.

Pour un bon nombre d’élèves, on dirait la guerre (certains identifient des soldats dans le tableau).

D’autres placent le débat dans une autre sphère, celle de l’imagination : c’est dans un rêve, on peut le voir dans nos rêves, ou encore émerge l’hypothèse du théâtre.

Enfin, lorsque certains précisaient que ce sont des monstres qui sortent de la terre, d’autres reprennent cette idée, en parlant des égouts, très très profonds, dans la lave, pour terminer, à la manière d’une révélation, par dans le noyau de la terre, en enfer parce qu’il y a du feu et des monstres qui sortent, et une armée de singes-gorille.

Concernant Orphée, certains postulent que s’il arrête de faire de la musique, on va lui couper la tête, parce que c’est un esclave que l’on a forcé à faire de la musique, montrant ainsi leur perception intuitive des Enfers.

A la fin de la séance, et ce, pour préparer la séance suivante, le nom d’Orphée est apporté aux élèves.


Séances 2 et 3 : Production d’écrits autour de l’œuvre picturale
Domaine : Maîtrise de la langue (production d’écrits, confrontation d’hypothèses)

La deuxième séance est consacrée à la production écrite individuelle d’hypothèses concernant le tableau préalablement étudié collectivement. Les élèves doivent en effet répondre à la question Qu’est-ce qui est raconté dans (par) ce tableau ? Cette production d’hypothèses correspond alors à une situation de recherche, puisque aucune validation n’a été faite lors de la première étape. Cette activité permet également de constituer une trace individuelle de l’analyse collective du tableau.

Les élèves se sont mis activement et avec enthousiasme à l’écriture de l’histoire censée être "dite" par le tableau. Ils ont bien réinvesti les hypothèses qui avaient été faites lors de la séance collective. Pour d’autres, cet espace d’écriture a été l’occasion de faire montre d’une imagination étonnante, notamment Jason, qui réinvestit de manière tout à fait amusante la connaissance des grands nombres, signifiant de manière intuitive sa perception de la grandeur chaotique des Enfers. Certains élèves ont pu prendre l’initiative de donner un titre à leur production : Andréa : Le roi et la reine (indication des personnages), Anthony : La grotte (indication du lieu), Jason : Le roi tueur d’hommes (indication de l'action).

Jason (Cm1)

Le roi tueur d’hommes
Le roi a dit à ses soldats de ramener 800 000 esclaves pour refaire son château car il a été détruit par un autre roi. Il en mit 400 000 dans les donjons et 400 000 pour refaire son château. Les 400 000 esclaves qui sont dans les donjons devaient répondre à des questions. L’un des esclaves savait chanter et cet esclave était Orphée. Il ne pensait qu’à la musique donc il chante devant le roi et la reine jour et nuit et s’il s’arrête de faire la musique, on lui coupe la tête. Quant aux autres esclaves, 100 000 ne voulaient pas répondre et se faisaient couper la tête donc, il n’en reste plus que 700 000 à travailler. 80 000 moururent de faim. Quatre mois plus tard, le château n’était toujours pas fini. Quatre ans plus tard, le château est enfin fini. Le roi prend ses esclaves pour en faire des soldats donc il avait 1 000 000 de soldats. Il voulait reprendre sa revanche. Et il la gagne. Son royaume n’était plus embêté et il n’y a plus de guerre pour longtemps.

Andréa (Cm1)

Le roi et la reine
Il y a un musicien qui s’appelait Orphée. Il jouait de la musique devant un roi et une reine. Le musicien dit : "Il ne faut pas que j’arrête la musique ou je vais me faire pendre ". Et il y a une dame qui était partie en exploration et a vu les grottes et s’est rapprochée et a entendu du bruit et on l’amena au roi et à la reine. Dans cette grotte, il y a un un parc d’attraction qui prenait feu alors elle cria "au feu, au feu ".

Anthony (Cm1)

La grotte
Il y a un musicien qui s’appelle Orphée, et des animaux, et des esclaves, et des dinosaures. Il y a un roi et une reine. Ils font la guerre, et il y a des lumières. Il y a des hommes qui sautent pour mourir, et il y a des hommes pendus avec une corde et ils meurent.

A l'instar de Jason, d'autres élèves ont également réinvesti des connaissances antérieures (Guillaume, notamment). Cet appui sur des acquis antérieurs face à une situation de recherche est tout à fait pertinent, indiquant la tentative de mettre en lien les savoirs.

Guillaume (Ce2)

C’est dans un pays où c’est la guerre. Il y a des gens qui meurent, des bêtes qui n’existent pas ! C’est dans le milieu du noyau de la terre. C’est un volcan qui s’étouffe. C’est dans la grotte du volcan. Il y a aussi des bêtes qui les étouffent et qui les dévorent tout crus. En fait, c’est des robots omnivores qui mangent de tout, aussi bien de la viande que des légumes.

Généralement, chaque production introduit les personnages principaux, notamment "le roi et la reine" (prégnance du conte, genre sur lequel ces élèves ont beaucoup travaillé).

Kévin (Ce2)

On voit un roi et une reine. Ca se passe en enfer. On voit un musicien, il s’appelle Orphée.

Amar (Ce2)

Il raconte une histoire. Un musicien qui s’appelle Orphée. Des singes, des monstres bizarres… On dirait un parc d’attraction. Il y a même un roi et une reine.

Certaines productions tentent de dépeindre le climat des Enfers (monstres, esclaves, morts, violence, etc.) :

Ericka (Cm1)

Les soldats font la guerre. Le roi et la reine ont des esclaves. Si les esclaves ne font pas ce qu’ils veulent, le roi les tue. Le musicien Orphée doit faire de la musique au roi et la reine. Le roi a des prisonniers qu’il tue. Le roi a des animaux.

Charlyne (Cm1)

C’est un roi et une reine qui mettent leurs esclaves dans une grotte où ils vivaient et après ils se servent d’eux. Il y avait des bêtes. Le roi demandait à ses esclaves de tuer des bêtes. Le roi avait un musicien qui s’appelait Orphée. C’était à des femmes d’aller chercher les esclaves. Ils pendaient des gens, des animaux au plafond quand les gens et les animaux étaient morts.

Tennessee (Cm1)

Les hommes font la guerre, il y a une reine et un roi. Il y a un musicien qui s’appelle Orphée. Ca se passe dans une grotte. Il y a un prisonnier, un homme le tient et le deuxième le frappe. Il y a des animaux, des monstres, il y a des esclaves. Il y a des hommes, au dessus, une grande maison, et des hommes montent et les autres hommes qui sont au dessus de la maison les empêchent de monter.

Aurélien (Cm1)

Il y a des hommes pendus et les autres sautent dans l’eau pour s’enfuir. Il y a des chasseurs pour aller tuer des animaux. Le roi et la reine écoutent le musicien. Et où il vit, il y a des animaux et des ampoules pour la lumière. Il y a des hommes monstres, une maison et les restes des hommes.
Cette activité est également l’occasion d’évaluer le niveau des élèves en production d’écrit (utilisation des substituts et des reprises, utilisation des connecteurs temporels, cohérence interne, répétition, etc.), évaluation qui permettra de conduire de manière formative le résumé final.

La troisième séance voit les élèves terminer leur production, et l’exposer à la classe (lecture à haute voix suivie d’une discussion autour du sens et de la cohérence).

Une mise en commun des hypothèses peut porter sur l’endroit supposé, hypothèse ensuite validée par l’apport du titre de l’œuvre : Orphée aux Enfers. Dès lors, l'apport du mythe prend tout son sens : pour comprendre encore mieux ce que "raconte" le tableau, il est nécessaire de connaître le mythe.


Séance 4 : Lecture "par dévoilement progressif" du mythe
Domaine : Lecture littéraire

Le texte étant assez complexe, la lecture du mythe est faite par le maître. En effet, le document officiel concernant la Littérature au cycle 3 recommande une lecture par le maître des passages clés et/ou des passages complexes. La lecture du mythe d'Orphée et Eurydice s’entrecoupe de formulations d’hypothèses aux moments significatifs du récit, et de reformulations de ce qui a été compris. Il s’agit alors pour les élèves d’anticiper, à la lumière de ce qu’ils viennent d’entendre et de comprendre.

a) La première mort d’Eurydice : "Que va faire Orphée ?"

Ancrés dans la société actuelle, certains imaginent qu’Orphée va trouver une autre femme. D’autres, ayant perçu le rôle indirectement perturbateur d’Aristée, supposent qu’Orphée va se venger d’Aristée. Certains imputent la responsabilité de la mort d'Eurydice au serpent ; aussi pensent-ils qu’Orphée va tuer tous les serpents, ou couper toutes les herbes pour chercher le serpent. L’hypothèse d’une tromperie du texte (peut-être qu’elle n’est pas complètement morte, elle est peut-être juste tombée dans les pommes) a également été formulée.

b) "A ces mots, Orphée sursaute et s’écrie" : Que va t-il dire ?"

C’est à cette étape du récit que les élèves ont perçu le lien avec le tableau Orphée aux Enfers. Aussi posent-ils l’hypothèse qu’il veut la rejoindre en enfer. Un élève, pris au jeu, parle au nom d’Orphée : Je vais tout faire pour la sauver !. Certains élèves anticipent d’ailleurs l’arrivée d’Orphée aux Enfers, et supposent que cela ne va pas être facile de récupérer Eurydice. Ils imaginent qu’il va devoir faire trois épreuves, battre des lutins, ou encore, aller voir la lumière jaune (référence au tableau). Quelques élèves, perturbés par la notion d’enfer, évoquent l’idée qu’Eurydice puisse aller au paradis. Enfin, certains élèves plus terre-à-terre imaginent qu’Orphée va emmener son épouse voir un médecin, qui pourra la soigner avec des herbes. Ceux-ci répondent d’ailleurs avec grande conviction aux élèves peu convaincus par cette idée (ben oui ! Ca se fait !).

A cette étape de la lecture, certains élèves reviennent spontanément sur le tableau de Bruegel et posent l’hypothèse que la femme préalablement identifiée comme étant une prisonnière est Eurydice.
Les premiers liens semblent se créer d’eux-mêmes…

d) La réponse d’Hadès
Les élèves supposent que le dieu des Enfers va demander à Orphée de jouer de la musique pour qu’il accepte de libérer sa femme (référence aux hypothèses formulées lors de l’analyse du tableau). Certains élèves prennent la voix d’Hadès et montrent du même coup qu’ils ont compris les allusions, dans le texte, à l’impossibilité de revenir des Enfers : Le roi dit : Non ! Parce que personne ne part des Enfers. D’autres sont cohérents avec les hypothèses préalables, concernant des épreuves imposées à Orphée :Il va dire oui mais il faut faire des épreuves et promettre que tu la ramèneras (notons le passage du discours indirect au discours direct). L’imaginaire s’évade et les références judéo-chrétiennes interviennent alors : il va demander d’aller tuer le Dieu du Paradis.
e) Orphée va t-il parvenir à respecter la condition posée par Hadès ?
Emerge à ce moment une discussion autour de l’intérêt à court terme des comportements, guidés par la passion (Il ne va pas y arriver, il va craquer et lui parler parce qu’il l’aime trop) et celui des comportements à plus long terme, guidés par la raison (Non ! Il pourra faire ce qu’il veut après, s’il attend). Un enjeu moral de ce mythe - être patient est profitable – est donc implicitement saisi.

f) La deuxième mort d’Eurydice

"Dans l'ombre", symbolisant la mort d'Eurydice, a de suite été compris comme tel. En outre, les élèves ont compris l’enjeu : Orphée a traversé la limite, mais pas Eurydice, il s’est retourné trop tôt.

g) Impressions finales

Un retour à l’aspect émotionnel est amorcé par certains élèves : "C’est triste, parce que c’est en enfer. Eurydice meurt ou encore Je n’aime pas les histoires qui parlent de mort.. C'est la déception et la tristesse qui ont prédominé.


Deuxième étape : Analyse fine du texte

Séances 5 et 6 : Repérage des personnages, des actions, etc.
Domaines : Lecture littéraire, Observation réfléchie de la langue

Une période d’exploration libre du texte débute la séance. Un questionnement oral sur le paratexte (numérotation des lignes, titre, auteur, éditeur, etc.) est ensuite mené. Le travail à partir de questionnaires permet de guider la lecture, par la recherche d’indices pertinents.

a) Collectif / Oral

Un rappel de la trame narrative du récit est fait collectivement, ce qui a permet de retracer chronologiquement les grands moments de l’histoire : la rencontre entre Orphée et Eurydice, le mariage, le moment où le mariage est perturbé, la première mort d’Eurydice, Orphée aux Enfers, la seconde mort d’Eurydice.

b) Individuel / Ecrit

Ce rappel collectif permet aux élèves d’entrer avec confiance dans la lecture individuelle, et d’y rechercher des indices afin de compléter le questionnaire : remise en ordre des grands moments de l’histoire, recherche des personnages secondaires, obligeant les élèves à prendre en compte les phénomènes de substitution et de reprise.

La remise en ordre des grands moments de l’histoire n’a posé aucun problème.
En revanche, retrouver les personnages "actants" a été plus difficile (non prise en compte des reprises : par exemple, Aristée et "le berger" sont traités comme deux personnages) mais tout à fait formative.
c) Collectif / Oral : Mise en commun
Une mise en commun a permis de mettre à jour les phénomènes de reprise. Un pas vers la compréhension fine du texte a pu être franchi.


Séance 7 : Caractériser un personnage
Domaine : Observation réfléchie de la langue

Après le repérage des personnages "actants", un travail précis sur le texte autour du personnage d’Orphée est entrepris, en vue d’élaborer une fiche d’identité. Cette recherche est guidée par un questionnaire. Une recherche fine dans le texte est nécessaire pour caractériser le caractère d'Orphée (par exemple, "jeune téméraire" devrait être compris par les élèves comme se référant à Orphée).

La constitution d’une fiche d’identité constitue la trace écrite.


Séance 8 : Imaginer… Représenter…
Domaine : Arts visuels

Il s'agit pour les élèves d'imaginer le personnage d'Orphée, en vue de compléter la fiche d'identité par une représentation personnelle.

A ce niveau, l'entrée par les arts a quelque peu court-circuité la créativité des élèves puisqu'ils se sont davantage appliqués à se souvenir de la représentation de Bruegel qu'à imaginer Orphée à partir de leurs propres émotions. C'est là le "prix à payer" d'une entrée par les arts…

Mélissa (Ce2)
 
Jason (Cm1)
 
     
Guillaume (Ce2)
 
Aquila (Cm1)
 


Séance 9 : Elaboration d’un résumé

Il est proposé aux élèves d'élaborer individuellement un résumé du texte.

Cette séance n'a pas été profitable, les élèves rencontrant trop de difficultés dans cette tâche (problème de cohérence, pas d'utilisation des substituts et reprises, mauvaise maîtrise des temps verbaux, etc.). Il est vrai qu'au-delà de ces difficultés réelles, le résumé à ce moment du projet n'avait pas grand sens pour les élèves (quelle était alors sa fonction ?).

Troisième étape : Hypertextualité à travers un extrait d’opéra

Après une entrée par les arts visuels dans le mythe d’Orphée et Eurydice, et une lecture par dévoilement progressif, les élèves ont étudié le texte, par le biais de l’identification des grands moments du récit et de leur chronologie, de l’identification des personnages et de la création d’une fiche d’identité. Dès lors, ils ont été capables d'entendre un opéra, hypertexte du mythe.

Séance 10 : Ecoute musicale
Domaine : Education musicale

Lors de cette séance, il s’agit pour les élèves d’être capable de repérer des éléments musicaux caractéristiques, de soutenir une écoute et d’exprimer ses émotions. L’écoute portait sur l’extrait de l’opéra de Gluck (Orphée et Eurydice), intitulé "J’ai perdu mon Eurydice", et interprété par Maria Callas. Les élèves ne sont pas prévenus du lien existant entre ce qu’ils allaient entendre et le mythe d’Orphée et Eurydice.

Cette écoute fût assez déroutante pour ces enfants, davantage sensibles à la culture musicale de leur époque. Ils ont toutefois écouté les 4 min 19s avec attention, la consigne étant de comprendre les paroles et de faire attention à la musique (instruments, etc.). L’opéra étant un genre bien particulier, les rires ont parfois fusé, notamment lors des passages très aigus. Il est toutefois évident que ce "matériau" original ne les a pas laissés indifférents.

La perplexité a vite fait place à l’intérêt et l’écoute active. C’est triste ont dit certains. D’autres, au milieu de l’extrait, ont reconnu le prénom "Eurydice" et n’ont pu s’empêcher de faire partager leur découverte : mais, c’est Orphée qui chante ! (dénotant d’ailleurs une confusion entre l’interprète et le rôle), entraînant les autres à se questionner sur la voix (il a une voix aiguë, Orphée).

Après l’écoute, un questionnement sur les émotions ressenties a été initié. Une fiche "témoin d'écoute" pourrait être complétée.

Le lien avec le mythe étudié a été très vite perçu. Il a été étonnant de constater que beaucoup d'élèves se souvenaient du nom du compositeur et de celui de l'interprète. A la fin de ce questionnaire a été demandé aux élèves d’expliquer pourquoi ils avaient aimé ou non cet extrait. Sur 16 élèves, seulement cinq ont dit avoir aimé . Les argumentations restent plutôt faibles, malgré les sollicitations. Ceux qui ont aimé l’expliquent par le genre écouté (c’est beau l’opéra) ou par le voix particulière de l’interprète (la voix est bien haute, elle a une drôle de voix et elle crie trop fort, elle a une voix cassante, elle peut casser les vitre de l’opéra). Ceux qui n’ont pas aimé donnent des arguments de même type, tantôt au niveau du genre (ce n’est pas mon genre de musique), tantôt au niveau de la voix (elle monte si haut, elle casse les oreilles et sa voix est très forte et très aiguë, c’est trop fort).

Etonnant comme, quelques semaines après, l'évaluation change : lors d'un retour en classe, en présence de l'enseignante titulaire, tous se faisaient une joie de rapporter leur jugement positif face à l'extrait d'opéra !


Séance 11 : Analyse du texte de l’extrait
Domaine : Maîtrise de la langue / Intertextualité

Il s’agit pour les élèves d’être capables de comprendre un texte littéraire-poétique, notamment en repérant le lien entre l’extrait et le mythe étudié, et le moment où l’extrait se situe (prendre des indices). Enfin, plus spécifiquement, ils doivent être capables de repérer le lexique relatif à une émotion (la peine).

Après cette première phase – compréhension émotionnelle –, la distribution de la transcription de l’extrait permet une compréhension plus "raisonnée". Il s’agit alors pour les élèves de situer cet extrait par rapport à l’histoire d’origine. Un relevé de tous les mots et expressions permettant de savoir qu’Orphée a de la peine est ensuite réalisé pour valider cette première impression. Une recherche des mots rares dans le dictionnaire peut également être proposée.

La tristesse et la douleur que ressent Orphée ont été sont intuitivement perçues, ce qui leur a permis d’identifier cet extrait comme étant "la mort d’Eurydice". Les liens ainsi créés, la compréhension de la signification de l’extrait fût vive. Un relevé de tous les mots et expressions permettant de savoir qu’Orphée a de la peine a ensuite été réalisé pour valider cette première impression. Une recherche des mots rares dans le dictionnaire fût également proposée.

S’est posée ensuite la question de "quelle mort ? la première ou la deuxième ?". Tous ont un avis, mais non motivé par des indices pertinents. Il s’agissait alors de les amener à considérer qu’il manque quelque chose pour répondre à cette question. Ils se trouvaient en effet face à un extrait, et celui-ci n’est pas suffisant pour pouvoir situer précisément le moment auquel il renvoie. Un extrait (LIEN), précédent le premier (LIEN), a donc été distribué et les élèves ont de suite compris qu'il s'agissait de la deuxième mort : un élève de dire "c'est facile, on le sait dès la première phrase !" ("il se retourne...").

Un travail autour de la structure du texte peut être entrepris (notamment, sur le rôle des didascalies).

Une série de cinq autres extraits est ensuite distribuée. Il s'agit alors pour les élèves de déterminer pour chaque extrait : le locuteur, ce que l'extrait nous dit, le moment de l'histoire auquel l'extrait correspond, s'il existe une différence entre l'extrait d'opéra et le mythe. Cette activité a pour support un questionnaire sous forme de tableau à double entrée.

Cette activité a été plus que difficile. Certains élèves sont entrés dans la recherche, et ont été capables de prendre les indices nécessaires, mais une majorité n'en a pas été capable. C'est pourquoi il est évident que ce sont les modalités pédagogiques qui ont fait défaut : cette activité a été réalisée en individuel, et sans doute aurait-elle bénéficié d'un travail en groupe. De plus, le nombre d'extraits était sans doute trop élevé.
Un travail autour de la mise en voix de l’extrait est ensuite réalisé, dans le cadre de séances "décrochées". Il s'agit alors pour les élèves d'être capables de "dire" un texte, en adoptant un langage émotionnel adéquat. Le choix de se présenter aux autres est libre.
Même s'ils avaient le choix, il a été heureux de constater que l'enthousiasme des uns a motivé les autres, et les élèves les moins "studieux" se sont pris au jeu et ont parfaitement "appris" leur texte pour l'offrir aux autres. Notons que ces séances ont été filmées et que les élèves ont pu voir leur "prestation".


Quatrième étape : Elaboration de la trace écrite finale

Bien que d’autres activités peuvent prendre comme support le mythe d’Orphée et Eurydice, il faut toutefois désormais conclure par la réalisation d’une trace écrite finale, sorte de "témoin collectif de lecture", qui se déroule en petits groupes. Les compétences de chacun peuvent ainsi être mises à contribution afin que l’activité finale –constitution d’une affiche pour la classe– soit vécue le plus agréablement possible, et ne mette en échec aucun élève.

Après un questionnement collectif ayant pour but de faire émerger ce qui apparaîtrait sur la fiche (titre, description des personnages, résumé, illustrations), un premier groupe d’élèves –en autonomie- est en charge de la réalisation d’illustrations (Orphée, Eurydice, les Enfers), un deuxième groupe a pour "mission" de recopier l’extrait de l’opéra de Gluck, un troisième groupe travaille autour du titre (grosses lettres à découper et à décorer sur le thème des Enfers, puis à reconstituer et à coller sur l’affiche), tandis qu’un dernier groupe, en collectif et avec l’aide du maître, doit réaliser un résumé du mythe.

Orphée est un musicien, un chanteur et un poète. Son chant est magnifique. Un jour, il rencontre une dryade très jolie, qui s’appelle Eurydice. Ils tombent amoureux l’un de l’autre et @ se marient.
Le jour des noces, Eurydice se fait mordre par un serpent, en fuyant Aristée, le frère d’Orphée, qui aime aussi Eurydice. Le venin a fait son oeuvre, elle meurt et @ rejoint les Enfers.
Orphée est triste et désespéré. Il décide de la ramener du royaume des ombres.
Il arrive devant le dieu des Enfers, Hadès, et @ lui demande s’il peut récupérer sa bien-aimée. Le chant du jeune téméraire est si beau qu’Hadès accepte, mais à une seule condition : il ne devra ni lui parler, ni la regarder avant que tous deux ne franchissent la limite entre le monde des morts et celui des vivants.
Orphée conduit Eurydice vers la vie, et impatient de la voir, @ se retourne trop tôt.
Eurydice meurt à jamais…
Résumé collectif du mythe d’Orphée et Eurydice

Analyse du résumé produit collectivement : Un travail autour des substituts a été mené à partir du résumé du mythe d’Orphée et Eurydice. En effet, l’effort des élèves a été guidé vers l’utilisation d’anaphores : Substituts pronominaux (pronom possessif, pronom relatif, etc.), reprises (par une périphrase), ellipse du sujet (@).


Passez votre souris sur les différentes parties
de l'affiche pour en savoir plus.

Titre (tous les élèves) Illustration : Orphée (Mathieu) Illustration : Eurydice (Jason) Résumé collectif Fiche d’identité d’Orphée (Intimadati et Tennessee) Illustration : Les Enfers (Halim) Extrait de l’opéra de Gluck (Charlyne) Signature des élèves


Evaluation

Il n’est pas facile de trouver des modalités d’évaluation intéressantes. Ceci n’est guère étonnant, puisque le document d’accompagnement des programmes Lire et écrire au cycle 3 précise que la lecture littéraire présente des caractéristiques ne se prêtant pas facilement à une approche évaluative ponctuelle et normative. Il est donc recommandé de privilégier une forme d’observation continue des comportements. Ainsi, l’évaluation dans ce type de projet est difficile à mettre en œuvre, d'une part par la discipline principale mise en jeu, la littérature ; d'autre part, de par les objectifs culturels qui président ce projet.

Produire un résumé du mythe, créer un mythe ou encore répondre à un questionnaire ne nous semblent pas des réponses adéquates à ce problème : en effet, la production de résumé faisait partie des activités intermédiaires des élèves pour s’approprier le mythe. La création d’un mythe, qui aurait pu voir le réinvestissement des éléments fondateurs des mythes, pourrait être intéressante, mais à cette étape du projet, bien trop prématurée et relevant finalement peu de l’évaluation (mise en jeu de nombre de compétences non travaillées au cours de la séquence). Quant à l’utilisation d’un questionnaire, il peut comporter le risque de n’évaluer que les "connaissances" factuelles à propos du mythe, et ainsi revêtir un caractère fort réducteur. De plus, s’il avait pour fonction d’évaluer si les élèves sont "entrés" dans la lecture littéraire, cet aspect peut être évalué tout au long du projet, par les mises en lien et les anticipations dont les élèves font preuve.
Nous verrons qu'une évaluation finale ayant pour base les arts visuels est proposée en fin de projet.


Autour d’autres récits mythologiques

Après une première approche de la mythologie grecque par l’intermédiaire du mythe d’Orphée et Eurydice, un travail davantage en autonomie est proposé aux élèves, sur la base de quatre textes : Narcisse, Echo et Narcisse, Thésée et le Minotaure, Icare. Quatre groupes sont constitués. Nous prenons le parti de faire en sorte que les groupes soient hétérogènes ; ainsi, les compétences et difficultés de chacun peuvent être prises en compte (par exemple, les lecteurs en difficulté ne sont pas d’emblée "rebutés" puisque leur compréhension peut s’étayer sur celle des lecteurs plus "assurés").

Première étape : Approche du mythe et construction de la compréhension

Domaine : Littérature

Chaque groupe est installé à une table ayant un nom (relatif au mythe étudié). Les élèves sont invités à découvrir leur mythe. Une première lecture individuelle a lieu.
Après un premier passage de l'enseignant dans chacun des groupes pour initier le débat autour du mythe, les élèves sont amenés à relire le texte, une deuxième lecture guidée par la recherche des protagonistes (ce qui doit structurer également le récit oral qu'ils doivent faire au maître). Les élèves devant ensuite exposer leur mythe aux autres groupes, ils peuvent, s'ils le souhaitaient, produire un petit résumé (écrit de travail).
Au cours du travail en groupe, il est nécessaire de construire la notion de rôle et de les distribuer : scripteur, ambassadeur, distributeur de parole, rapporteur. La compréhension du texte s'étaye sur un questionnaire. Notons que pour favoriser les échanges entre les groupes, illustrer la nécessité de recourir à de nombreuses sources d'information pour construire ses connaissances et faire percevoir les liens intimes entre les différents mythes, certaines questions ne peuvent être validées qu'en échangeant avec un autre groupe.

Deuxième étape : Thésée et le Minotaure / Icare

Lecture
Domaine : Littérature ; Maîtrise de la langue (au niveau des locuteurs : oral, communiquer son interprétation ; au niveau des auditeurs : compréhension orale).

A l'issue du travail en groupes ayant pour objectif l'appropriation du mythe, une lecture par les élèves et le maître est faite à toute la classe. Les élèves du groupe doivent également soumettre le questionnaire (oralement) à la classe.

A la fin de la lecture de Thésée et le Minotaure se pose la question de savoir si Dédale va s’en sortir.

Lorsqu’à la fin de la lecture de Thésée et le Minotaure s’est posée la question de savoir si Dédale allait s’en sortir, deux hypothèses ont émergé : 1. Il va s’en sortir puisqu’il est le concepteur du labyrinthe (référence à une certaine logique), 2. Référence fine au texte mentionnant que personne ne peut sortir du labyrinthe (un élève de justifier : "non, personne ne peut s’en sortir ! C’est écrit dans le texte !").

La lecture d’Icare pouvait ensuite avoir lieu.

Elle s’est déroulée selon les mêmes modalités. A la fin de la lecture, nous avons abordé la portée "morale" de ce mythe, portée que les élèves ont relativement bien perçue. Aussi, ont-ils dit que "Icare a été trop haut, trop près du soleil, il est tombé", ou encore, tel une tentative d’explication, qu’il est allé "toujours plus haut, toujours plus haut, parce que c’est la 1ère fois qu’il volait, parce qu’il était tout content". La référence au texte a permis à un élève de dire que "peut-être qu’il n’est pas mort, rien ne le dit dans le texte". Effectivement, rien ne le dit, mais il a été intéressant de discuter de ce qui était suggéré par la fin : Icare pouvait-il être encore vivant ? (interprétation). A l’issue de cette discussion, une comparaison avec le propre comportement des élèves a été amorcée ("aller trop vite en vélo => chute").

Arts visuels

Après la lecture des mythes, les élèves sont invités à représenter le Minotaure.
Andréa (Cm1)
 
Intimadati (Cm1)
 
     
Guillaume (Ce2)
 
Mathieu (Cm1)
 
     
Anthony (Cm1)   Aquila (Cm1)
 

Jason (Cm1)

Une mise en commun autour des différentes productions a fait ressortir l'idée que tous les dessins étaient différents.

Ils ont été capables de percevoir que toutes les représentations étaient possibles, si tant est qu’elles respectaient les quelques informations contenues dans le texte. Le critère évaluatif privilégié par les élèves était l'aspect effrayant ou non du Minotaure ("Certains ne font pas peur", "celui-ci fait peur !").


Troisième étape : Echo et Narcisse / Narcisse

Lecture
Domaine : Littérature ; Maîtrise de la langue

La même démarche est utilisée pour les mythes Echo et Narcisse et Narcisse.

La portée métaphorique du mythe a été discutée, même si elle a été moins bien perçue que celle d'Icare. Les élèves ont parfois rencontré des difficultés à dépasser ce qui était dit par le texte (i.e. Narcisse est amoureux de sa propre image) pour percevoir – à leur niveau ! – le narcissisme. Une recherche dans le dictionnaire du substantif "Echo" a permis de se rendre compte de l'origine mythologique de ce mot.

Arts visuels

La fin du texte Narcisse comporte un "blanc" : quel est le reflet que Narcisse entrevoit dans le Styx ? Pour y répondre, les élèves sont invités à imaginer et représenter : 1. Narcisse avant sa mort, 2. Narcisse en Enfers, et le reflet qu’il voit dans le Styx.

Seulement certaines représentations ont dénoté une perception fine de ce qui se jouait dans ce mythe, représentant dans un premier temps la beauté de Narcisse, et dans un second temps, la laideur (avec visage déformé).

Amar (Ce2)
 
Aurélien (Cm1)


Evaluation finale : Arts visuels et mythes

Justification et modalités pédagogiques

Le projet étant construit autour de l'interdisciplinarité, une évaluation faisant intervenir les arts visuels semble parfaitement indiquée. Ainsi, après l’étude des différents mythes, une dernière séance est consacrée à l’analyse d’œuvres. Il s’agit alors pour les élèves de prendre des indices pertinents dans les tableaux pour savoir à quel mythe chacun d’entre eux fait référence (mettre en correspondance le mythe étudié et ses représentations artistiques). C'est à cette étape que la mise en lien des différentes disciplines devrait être la plus nette. Cette séance a également été l’occasion de fournir aux élèves une variété de représentations d’un même mythe.

Sont présentées simultanément les œuvres suivantes : Carlo SARACENI, La chute d’Icare (17ème siècle) ; Nicolas POUSSIN, Orphée et Eurydice (1650) ; Pablo PICASSO, Composition au Minotaure (1934) ; John William WATERHOUSE, Echo et Narcisse (1880) ; Jean RESTOUT, Orphée descendu aux Enfers pour demander Eurydice (1763) ; Marc CHAGALL, La chute d’Icare (1974).

Les modalités pédagogiques de cette séance ont été les suivantes : Recherche individuelle guidée par un questionnaire puis mise en commun.

Les verbalisations des élèves

La mise en commun permet de révéler deux axes d’analyse : la recherche des liens entre tableaux et mythes et la mise en écho des tableaux entre eux, axes conduisant à la prise de conscience de l’originalité de chaque représentation.


Les liens avec les mythes : Différences et ressemblances

Pour chaque tableau, les élèves ont trouvé les indices pertinents leur permettant de faire le lien avec le mythe.

- Carlo SARACENI, La chute d’Icare (17ème siècle)
Indice :
Les plumes de l’aigle.

- Marc CHAGALL, La chute d’Icare (1974)
La peinture très colorée de Chagall a d’abord laissé les élèves perplexes. Le rouge, évoquant pour certains le feu, induisait l’idée d’enfers, et ainsi, le mythe d’Orphée et Eurydice (des verbalisations similaires à celles relatif au tableau de Bruegel sont apparues). La mise en commun a permis d'éclairer les élèves, en les orientant sur le mouvement du personnage (la chute) et ses attributs (les ailes). Les élèves se sont posés beaucoup de questions sur ce tableau, ce qui est compréhensible puisque Chagall a déplacé le lieu de l'action, qui se déroule dans un village, où toute une foule de spectateurs regardent avec horreur la chute d’Icare.

- Nicolas POUSSIN, Orphée et Eurydice (1650)
Indices :
on voit une lyre et Orphée qui jouent, et les dryades (notons le raccourci lyre => Orphée), il y a un homme qui joue de la musique et ça m’a fait penser à Orphée car Orphée est un musicien.

- Jean RESTOUT, Orphée descendu aux Enfers pour demander Eurydice (1763)
Indices : le lieu (
la grotte derrière le dieu des Enfers) et les personnages (on voit le roi des Enfers et la déesse). Comme dans le tableau de Bruegel, Eurydice se trouve prisonnière entre deux hommes, ce qui a permis aux élèves de l'identifier. Notons que, compte-tenu du vocabulaire utilisé, il est clair que les élèves ont en tête le tableau de Bruegel (roi et reine au lieu de "dieu des Enfers" ou "Hadès").

- Pablo PICASSO, Composition au Minotaure (1934)
Indices : Eléments référant au taureau
(les cornes de l’homme blessé) et à son tragique destin (le monstre qui meurt). Notons que, lors de la mise en commun, cette représentation de Picasso a été replacée dans son contexte (représentation d'une corrida).

- John William WATERHOUSE, Echo et Narcisse (1880)
Indice : Le reflet de Narcisse dans l’eau (
le reflet de la rivière, un homme regarde dans l’eau). Du coup, les élèves ont posé l'hypothèse que la jeune femme représentée est Echo (Echo le regarde - en référence au texte).

Les élèves ont été très sensibles aux différences existant entre le mythe et la représentation subjective qu’en a fait l’artiste. Dans La chute d’Icare de Chagall, le feu remplace la mer (il y a du feu au lieu de la mer). De la même manière, il a représenté un village tandis que dans le mythe, il est absent. A l’inverse, le labyrinthe est absent du tableau tandis qu’il est le lieu principal de l’action dans le mythe.

Il a été passionnant de voir les élèves réinvestir les éléments d’un mythe tel des clés qui ouvrent la perception d’une œuvre… Ils n’auraient pas été capables de percevoir tant de choses dans un tableau s’ils ne disposaient pas de clés pour le faire. Aussi identifient-ils les dryades dans le tableau de Poussin. Ils ont été capables de situer la scène dans la chronologie du récit mythologique : le jour du mariage. Lorsqu’ils ont été questionnés sur la représentation du ciel, ils ont tous répondu qu’il était sombre, et sans qu’il ait fallu en demander davantage, il leur a paru évident que cela s’explique par le fait que "les Enfers viennent chercher Eurydice" (ce qui dénote une capacité d'interpréter une œuvre picturale vraiment étonnante).


Les liens entre les tableaux
Le tableau initial d’Orphée aux Enfers par Bruegel n’avait pas été exposé. Les élèves ont pourtant initié une comparaison de ce tableau avec celui de Restout, cherchant d’abord les ressemblances puis les différences, et se prononçant pour finir par une appréciation globale personnelle des deux œuvres. Aussi, certains élèves préféraient le tableau de Bruegel, parce que, selon eux, il donnait une meilleure idée de ce que peuvent être les Enfers (aussi ont-ils parlé des couleurs). D’autres élèves préféraient la représentation de Restout, parce que moins effrayante. Certains semblent ainsi avoir plaisir à se projeter à l’intérieur d’un univers étrange et effrayant tandis que d’autres préfèrent se rassurer.

Des représentations multiples et originales
Il a été intéressant de réinsister à ce moment du projet sur la multitude des représentations artistiques d’un mythe. Certains ont perçu avec acuité qu’il n’y avait pas une "bonne" représentation mais que chacune est l’écho de la subjectivité d’un artiste par rapport au mythe évoqué. Le lien a de suite été fait avec les représentations du Minotaure qu’ils ont réalisées (il n’y en a pas deux pareils). Ils ont également été sensibles au fait que les représentations diffèrent selon les époques, que les peintres s'inspirent de leurs prédécesseurs, une inspiration d’abord perçue comme de la copie (c’est un copieur, a dit un élève concernant la représentation d’Hadès par Restout et Bruegel).


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